--

Bajjenu Gox : La sollicitude maternelle au quotidien

De plus en plus, dans les quartiers, des femmes volontaires, appelées « Bajjenu gox », s’engagent à remédier à certains manquements dans les ménages. Au fil du temps, elles diversifient les secteurs d’intervention et sont de plus en plus sollicitées.

Depuis quelques années, certains soucis rencontrés dans les ménages sont gérés en interne par des femmes appelées Bajjenu goxGénéralement d’âge avancé, elles jouent le rôle de marraines. Les principales bénéficiaires de leurs conseils sont les « jeunes filles récemment mariées qui se plaignent souvent de leur vie de couple », renseigne Mame Diaaga Thiaw, bajjenu gox  au quartier de Gueule Tapée. En cette après-midi, elle rend visite à Marième Cissokho, la trésorière de l’association Diiso, dont elles sont toutes les deux membres fondatrices.

  Les domiciles des deux mamans, situés entre le centre de santé Elisabeth Diouf et le lycée Maurice Delafosse, ne sont séparés que d’une vingtaine de mètres. Dans un salon à l’ancienne de 3 mètres carrés, les sexagénaires discutent calmement du fonctionnement de leur association, avec une de leurs collaboratrices. A notre arrivée, cette dernière s’efface en compagnie de Mme Cissokho qui reviendra plus tard. 

Dans le salon décoré de vieilles photos de marabouts et de fauteuils entourant une table, le brouhaha des jeunes dans la rue parvient aux dames à  travers la fenêtre.  « En tant que bajjenu gox, mon rôle est d’assister les femmes de la période prénatale à la période postnatale », précise Mme Thiaw, affectueusement appelé Mame Diaaga, qui « prend du plaisir » à son apport à la vie de son quartier. Avec sa manière d’approcher les ayants besoins, beaucoup de jeunes femmes s’en ont sorties. 

Ndèye, jeune dame, rencontrée sur le trottoir de l’avenue Cheikh Anta Diop, en face de l’université du même nom, porte un bébé d’à peine quelques mois. Cette trentenaire au foulard bien attaché et au physique imposant a bénéficié du soutien d’une marraine dans son quartier de Fass Delorme« J’avais les jambes enflées lors de ma grossesse, dit-elle. Mais c’est la marraine du quartier, que je remercie beaucoup, qui m’a encadrée avec l’aide d’un médecin jusqu’à l’accouchement de mon bébé. Alhamdoulillah », confie-t-elle avec un léger sourire, dans une journée arrosée par de fins rayons solaires. 

Des femmes multifonctions

  Outre l’assistance aux femmes en état de grossesse, les Bajjenu gox de la commune de Gueule Tapée-Fass-Colobane élargissent leur domaine d’intervention dans la société, même si elles ne sont pas rémunérées. Elles interviennent dans le processus d’obtention « des certificats de mariage, des documents d’état civil pour les enfants, l’attribution de la bourse familiale initiée par l’Etat », selon Mme Thiaw, le regard dirigé vers la fenêtre, d’où jaillit le peu de lumière éclairant la pièce nonobstant les ustensiles arrimées à côté qui la réfléchisse. Cette lumière qu’elle incarne dans Gueule Tapée, conjuguée à une confiance inouïe des riverains, fait de Mame Diaaga, une femme très respectée.

 « Depuis plus d’une décennie, Mme Thiaw abat un travail colossal, reconnait Marème Cissokho. C’est pourquoi personne ne pense à la remplacer. En fait, elle est généreuse ». L’ouverture est, selon Mme Thiaw, la clé pour réussir le travail de marraine. « En fait, il faut être flexible, tolérant et capable de communiquer avec les gens, qu’importe leur âge », affirme-t-elle, se ventilant avec un éventail. 

De plus, dans le « comité consultatif de la commune composé de plus de 80 associations » dont Mme Thiaw est l’adjointe au président, « des informations intéressantes sont partagées et en plus d’une initiative salutaire qui consiste à former les jeunes mariées au rôle des bajjenu gox ». Initiative que Ndèye bénie et promet de se renseigner.

A une époque où le nombre de cas sociaux confrontés aux aléas de la vie augmente quotidiennement, Marième Cissokho invite à « plus de solidarité et de soutien envers les bajjenu gox » du fait du «travail de l’ombre» qu’elles assurent. 

Publié

Journaliste sénégalais titulaire du diplôme en journalisme et communication au Cesti, j'ai débuté ma carrière, en tant qu'étudiant, au quotidien Le Soleil, en 2022. Mes productions m'ont valu, cinq mois plus tard, de remporter le 3ème prix du meilleur reportage catégorie Étudiant, décerné par la Convention des jeunes reporters du Sénégal (CJRS). Je m'intéresse principalement à l'économie, à la culture, à l'environnement et au sport. Veuillez me suivre sur les réseaux sociaux.

--