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A Colobane, les avis divergent sur le départ de Macky Sall le 2 avril

Dans un tweet sur le réseau social X, le président de la République Macky Sall, a réaffirmé sa volonté de quitter ses fonctions le 2 avril 2024. Cette date correspond à la fin officielle de son mandat à la tête du pays. Cependant, à Colobane, certains Sénégalais doutent de la sincérité de ses propos.

Difficile d’accéder sur les lieux à cause des embouteillages. À Colobane, il est 10 heures. Le soleil vient de commencer sa longue course et ses rayons s’infiltrent de façon magnifique à travers le feuillage des arbres. Il fait un froid de canard accompagné d’une forte poussière obligeant certains à porter un masque dans ce lieu attractif et fréquenté. La circulation est dense. Conséquence : piétons et automobilistes se partagent la chaussée. De loin, les voix des vendeurs se font entendre. L’expression « Morceau 100 francs », scandée régulièrement à haute voix, domine l’ambiance chez les vendeurs de friperie.

Le marché de Colobane, à Dakar, est aussi un lieu pour parler politique. Ce quartier est souvent un lieu où se tiennent des manifestations politiques. La dernière en date a lieu le vendredi 9 février 2024. Des affrontements entre forces de l’ordre et les manifestants avaient éclaté à Colobane occasionnant la mort de Modou Guèye, tué par balle après l’annonce du report de l’élection présidentielle du 25 février. Lors de l’ouverture du dialogue national le lundi 26 février au Centre international de conférence Abdou Diouf de Diamniadio (CIDAD), Macky Sall déclare : « Le 02 avril, je quitte mes fonctions de Président. Je suis fatigué ».

Le jeudi 29 février, il a réaffirmé, sur le réseau social X, son intention de quitter ses fonctions au terme de son mandat : « la date de mon départ reste absolument ferme », a-t-il indiqué. Un départ qu’il a annoncé plusieurs fois au peuple sénégalais. Cependant, certains citoyens doutent de la sincérité des propos de Macky Sall.

Une décision qui a créé des doutes

Deux paires de chaussures de basket à la main, un sac sur son dos, Ousmane Thiam, marchand ambulant, ne rate rien de l’actualité politique. Il déclare : « Macky Sall ne croit même pas à ses propos sur son départ à la tête du pays, le 02 avril. Il veut rester. Il le sait et nous le savons aussi ».

Avant de terminer sa phrase, son ami Matar se précipite à donner son avis sur le sujet. Cigarette à la main, l’homme a une taille assez élancée. Écharpe aux couleurs du drapeau national autour du cou, le trentenaire participe régulièrement aux manifestations politiques organisées par l’opposition sénégalaise. Il est d’avis que le président ne va pas quitter ses fonctions après le deux (2) avril. « Il veut nous forcer un troisième mandat après le 02. Il ne croit pas à un seul mot de ce qu’il dit. Tout ça est un deal politique », se justifie-t-il. Mais ces deux jeunes hommes ne se laisseront pas faire : « nous nous battrons corps et âme pour que Macky Sall quitte la présidence du pays à la fin de son mandat », disent-ils.

Un peu plus loin d’eux, à la place de la Nation, se trouve un groupe de jeunes étudiants. Le sujet de discussion d’aujourd’hui est la situation politique du pays. Ils forment un cercle et Aly Fall l’un d’eux est au milieu. Il est le modérateur du débat. La discussion très animée, chacun d’eux donne son avis sur le départ du président de la République. Bassirou Diop, étudiant en management, ne croit pas à un éventuel départ du chef de l’Etat. Il dit ne pas comprendre ses nombreuses annonces. « S’il veut vraiment partir, il n’a qu’à le faire. Pourquoi il nous tympanise avec le 02 avril, je quitte mes fonctions ? Il l’a dit une fois, nous l’avons attendu, c’est bon. Pas la peine de le répéter », s’interroge-t-il.

Selon l’étudiant, Macky Sall n’a jamais eu l’intention de quitter la présidence de la République le 02. « Il est juste en train de leurrer les Sénégalais. Mais il nous trouvera sur son chemin », ajoute-t-il. Pourtant, lors d’un entretien accordé à trois groupes de médias de la place, le Président a réaffirmé son désir de laisser le pouvoir. Mais, pour Babacar Diouf, un des débatteurs, c’est la constitution sénégalaise qui lui impose de quitter le pouvoir à la fin de son mandat. Il estime que quitter ses fonctions n’est pas « un acte héroïque de la part du Président ».

Ibrahima, camarade de classe de Babacar, n’est pas de cet avis. Selon lui, Macky Sall a bel et bien le droit de rester au-delà de cette date. « Je crois fermement aux propos du Président. Mais il a le devoir d’organiser l’élection présidentielle. Il devrait aussi rester en poste jusqu’à l’installation de son successeur. L’article 36 de la Constitution l’a bien précisé », informe l’étudiant, habillé en tenue africaine marron-beige.

« Tu ne maîtrises rien de ce que tu dis Ibrahima », lâche Oumy Ndoye, la seule dame du groupe. Pour elle, si le peuple laisse le Président Sall à la tête du pays après le 02 avril, il y restera jusqu’en 2035 : « Ce gouvernement n’est pas prêt à céder le pouvoir. Ils sont prêts à tout pour rester à la tête du pays. Ils savent bien manipuler la Constitution et les Sénégalais ».

Publié

Je suis diplômée du CESTI, lauréate du Prix Étudiant de la Convention des Jeunes Reporters du Sénégal. Je suis journaliste parce que je veux comprendre vite et faire comprendre vite.

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