Au quai de pêche de Joal, les charrettes assurent le transport des poissons
Au quai de pêche de Joal, les charrettes assurent le transport des poissons
A 13h, le reflet des rayons de soleil tape sur la mer de Joal. Cette forte canicule de ce samedi du mois de juillet n’empêche en rien les activités des charretiers au quai de pêche. Les charrettes ont toujours servi le transport des poissons de ce lieu vers les marchés locaux. Installées un peu partout, des femmes attendent le débarquement des poissons avec patience.
Des eaux puantes polluent le milieu, une manière spéciale pour souhaiter la bienvenue aux visiteurs. Pour ces derniers, l’accès au quai n’est pas chose aisée à cause des chevaux. Leur présence n’est pas fortuite. Ils assurent à l’aide des charrettes, le transport des produits de pêche. Aux aguets de potentiels clients, les charretiers attendant de gagner une commission vers les localités de Tanor ou encore vers Khelcom à quelques kilomètres de Joal.
Ensemble jogging rouge assorti d’une casquette blanche, Massamba Sène est charretier au quai depuis maintenant 13 ans. Assis sur sa charrette et muni d’un fouet, il tient la bride de son cheval marron «Koromak» (ndrl: le grand homme en sérère) à la main, il revient sur son amour pour ce métier.
«Depuis tout petit, mon papa me tenait la main pour m’emmener avec lui. Il était charretier et c’est lui qui m’a appris tout sur ce métier. Aujourd’hui il est décédé et j’assure la relève avec passion», explique-t-il, avec honneur. Au-delà de sa passion, ce travail assure sa survie : «C’est avec ce métier que je me suis marié et aujourd’hui je parviens à subvenir à mes besoins et ceux de ma famille Alhamdoulilah». Comme Massamba, Jean Paul exerce aussi cette même activité.
Debout sur sa charrette, Paul ou encore «Petit» comme le surnomme ses collègues, car mesurant 1m 30, évolue dans ce milieu depuis 2020. Et contrairement à Massamba, c’est le fruit du hasard qui l'a conduit à exercer ce métier.
«Cela fera bientôt 3 ans que je m’active comme charretier. Je n’ai pas eu mieux», avant d’ajouter qu’il s’en sort bien parce qu’il peut rentrer avec 10 000 mille FCFA par jour. Toutefois, il précise qu’il peut renter avec moins. Selon lui tout dépend du prix que les clients payent même si ce dernier est fixe par les charretiers.
Le prix du transport
Charrette bien remplie de poisson, Abdou Sène s’apprête à partir vers Tanor, lieu de débarquement du produit. Visiblement pressé, il accorde quand même quelques petites minutes pour échanger sur les tarifs du transport: «Les prix varient entre 2500 et 3000 FCFA. Ce sont des prix fixes et cela partout ».
Seulement à l’en croire les prix ont grimpé jusqu’à 3500 fcfa durant la période de la Covid-19. Demba Sarr corrobore le propos d’Abdou. Couché sur le hall d’un bâtiment et bercé par la voix de Yande Codou Sène, icône de la musique sénégalaise en général et sérère en particulier, la trentaine estime que les prix du transport ne sont pas chers et ils sont à la portée de tout le monde. Déclaration que réfutent les femmes.
Le son mélodieux des vagues, la légère brise iodée et la texture du sable sous les pieds de ces dames. Astou Ndong est l’une d’entre des femmes assissent à quelques mètres de l’eau et qui attendent l’arrivée de la marchandise. Pour donner son avis, elle s’attaque à Demba. Selon elle, le prix du transport est tellement cher: «Parfois on ne fait pas de bénéfice car une fois sur le dépotoir nous payons aussi pour la grillade des poissons».
Elle exhorte les charretiers à diminuer les prix. La solidarité féminine est bien «joalloise». Mariama Diallo, une peulh au milieu des sérères appui sa cousine Astou sur ces propos mais en fustigeant surtout le comportement de certains charretiers. Juste après le dernier mot de Mariama, vient la réplique de Malick Tine qui jusque-là écoutait la discussion debout sur sa charrette dans l’eau à quelques mètres du quai, les mains sur sa taille.
Selon le sieur Tine, les femmes ne peuvent pas trouver mieux: «Parfois même, je me demande si elles oublient le difficile trajet que les transporteurs parcourent chaque jour». Des problèmes, il n’en manque pas dans ce secteur selon les interlocuteurs.
Les difficultés rencontrées
Difficile de trouver Mbaye Sène, le président de l’association des charretiers du quai de pêche de Joal. Après plusieurs tours, il se présente enfin pour répondre aux différentes questions sous le chaud soleil. L’homme au chapeau marron-beige est occupé à régler les problèmes de ses collègues. «Ce métier rencontre d’énormes problèmes, déjà le trajet fait 10km et la route n’est pas bitumée. Nos chevaux souffrent avant d’accéder sur les lieux», martèle-t-il.
Il revendique un espace qui leur servirait de garage. A l’en croire, ils assistent au quotidien à toute sorte de problèmes. Ces charretiers demandent à l’Etat du Sénégal d’investir dans leur milieu car selon eux, « vivre et réussir à Joal-Fadhiouth, c’est bien possible».