Le café Touba, boisson exaltante consommée sans modération
Faisant partie des boissons chaudes les plus populaires du pays, le café Touba jouit d’une considérable notoriété surtout auprès de la communauté mouride qui en consomme régulièrement et parfois de façon abusive. Cependant, certaines personnes se montrent réticentes à la consommation du breuvage chaud, certains vendeurs ajoutant à la boisson aromatisée du poivre de Selim, des ingrédients qui peuvent nuire à la santé.
Distribuer tasse après tasse de la boisson chaude « sans répit », avec un visage sémillant, plein d’entrain, fait partie du quotidien d’Abdou. Il répète ce même geste, sans difficulté apparente, durant toute la matinée. « Je monnaye les tasses de café à 50 Fcfa, chaque tasse que je distille est synonyme de gain pour moi », renseigne le vendeur avec un large sourire laissant apparaitre des dents nacrées.
Il est à peine 9 heures, et les férus du café Touba ont investi le point de vente d’Abdou, se trouvant près des cimetières de Yoff. Les effluves de la boisson chaude, teintées d’arôme, se dégageant des thermos, bien posés sur une table à l’effigie de quelques saints et garnie par des sachets de beignets, semblent attirer les inconditionnels du café Touba. Ils sont visiblement happés par cette « envie irrésistible » de boire cette boisson chaude au quotidien.
Parmi la ribambelle de clients, Khadim, la mine circonspecte et surtout flegmatique, il égraine à un rythme lent le chapelet qu’il tient à sa main droite, en fredonnant les « Qassidas ». A première vue, rien dans son attitude placide ne semble trahir son désir ardent de se procurer sa boisson préférée.
Consommation abusive
« Je piaffe d’impatience de boire du café, c’est comme une sorte de drogue, pas celle que les narcos prennent, mais drogue imbue de vertus que je ne saurai point dire », renseigne le disciple mouride tout en se tortillant les dreadlocks touffues qui sont d’une noirceur luisante. Khadim, « fervent dévot », talibé de Maam Ceerno, confie qu’il consomme de manière abusive le café Touba, cette attitude quelque peu insouciante se justifie. « Ce n’est pas fortuit de constater que cette boisson est consommée partout dans le pays. Le café Touba doit sa popularité à notre guide Cheikh Ahmadou Bamba », poursuit-il, en prenant une gorgée de café.
« Chaque disciple doit consommer au quotidien autant de tasse qu’il peut se permettre. Je ne connais pas le nombre de tasses que je bois quotidiennement. Au bas mot, j’en prends 5 tasses », affirme Khadim, jetant dans la poubelle qui se trouve au pied de la table, la tasse qu’il vient de vider.
Un autre client faisant partie des amateurs qui défilent à longueur de journée dans ce point de repère des férus de la boisson, accepte, lui aussi, de se confier sur sa consommation « abusive » du café Touba. A la différence de Khadim, ce jeune au corps gracile, n’est pas un disciple mouride, mais il révèle en prendre autant de tasses que certains qui se réclament de la confrérie. Il est pour le moins intrigué par sa consommation quelque peu immodérée de la boisson.
« J’accorde peu d’importance à ma santé. Ce qui importe, c’est de boire le café Tuuba, lorsqu’on en éprouve le besoin. Si je reste une demi-journée sans boire cette boisson chaude à la teneur forte, j’ai comme l’impression que ma va exploser. Je suis vraiment addictif à cette boisson », explique qui préfère garder son nom sous le sceau de l’anonymat.
Faire gaffe aux produits mélangés avec le café
Quoique le café Touba jouit d’une grande notoriété, sa consommation est sujette à débat, car d’aucuns jugent que c’est risqué de boire le breuvage chaud. En effet, certains vendeurs perfides préparent la boisson chaude en y rajoutant du piment, de l’arachide ou encore du riz, ce qui, selon eux, pourrait porter atteinte aux consommateurs.
Confortablement assis devant son fourneau malgache, Babacar, plus connu sous le sobriquet de "Bab’s café", attise les braises. Il est sur le point de filtrer la boisson dans un seau. A l’en croire, il vend du café pur qu’il ne mélange pas avec d’autres produits. « Je reconnais que certains font usage de ce subterfuge, mais je vous assure que le café que je prépare est hyper sain à la consommation. Vous pouvez goûter par vous-même », fait-il savoir sur un ton serein. Comme au point de vente d’Abdou, les forts relents du café attirent la curiosité de certains passants qui corroborent les propos de "Bab’s café" qui s’attèle à adoucir la saveur de la boisson en y ajoutant une quantité considérable de sucre.
« Je pense qu’il vend du café naturel, ça se sent dès la première gorgée. Je suis habitué à boire cette boisson, je peux, d’emblée, reconnaitre du bon café », lâche Amadou, un gardien de sécurité précisant tout de même que le café l’aide à rester éveillé durant ses heures de travail.
Le café est une boisson infusée préparée à partir des graines de café torréfié. Mais au fil des années, il est devenu une boisson incontournable pour bon nombre de personnes, il est consommé par deux Sénégalais sur trois, soit plus 66% de la population.